Et si on regardait enfin le cerveau dans l’accompagnement psychologique ?
Je ne suis ni psychologue ni médecin. Je suis praticienne en neurofeedback et biofeedback, récemment formée, encore en construction. Mais plus j’avance dans ce domaine, plus je découvre l’envers du décor et ce que je vois me bouleverse autant qu’il me donne espoir.
J’ai grandi dans un paysage où la parole tenait une place centrale dans l’accompagnement des souffrances psychiques. Et je continue de penser que la parole est précieuse, parfois vitale. Mais aujourd’hui, je me rends compte qu’elle ne suffit pas toujours. Parce qu’il y a des souffrances qui ne s’expriment pas avec des mots. Des stress répétés, des tensions jamais relâchées, des états internes qui se sont installés et sont devenus des traits de fonctionnement. Comme si le corps avait verrouillé une réponse sans qu’on s’en rende compte.
On parle souvent de traumatismes avec un grand “T”. Mais ce que je rencontre, en parlant avec les gens autour de moi, en observant les EEG d’évaluation, ou simplement en me familiarisant avec le fonctionnement du système nerveux, ce sont les petits “t” — ces micro-événements, ces absences de sécurité, ces stress chroniques que la théorie polyvagale éclaire si bien. Et je me dis que ce sont ces petits “t” qui façonnent les grands “je n’arrive plus à dormir”, “je suis tout le temps stressée”, “je me sens vidé·e”.
Ce que je trouve fascinant, avec le neurofeedback et le biofeedback, c’est qu’on peut voir ça. On peut observer, objectiver, quantifier. Pas pour mettre les gens dans des cases, mais pour leur donner un miroir physiologique. Pour leur montrer que non, ce n’est pas “dans leur tête”. Que le système nerveux a une mémoire. Et que cette mémoire, on peut l’entraîner, la réguler, la remettre en mouvement.
Ce n’est pas une baguette magique. Ce n’est pas une alternative à la thérapie. C’est une autre porte d’entrée. Une qui passe par le corps, les rythmes, les signaux invisibles mais bien présents. Et je crois profondément que c’est en croisant ces approches qu’on pourra enfin proposer un accompagnement plus juste, plus incarné, plus respectueux de la réalité des personnes.
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